Pour garantir un contrôle complet et effectif de l’action des services de renseignement, le législateur a attribué à un organisme spécialisé, la CNCTR, des pouvoirs de vérification portant sur toutes les étapes de la procédure de mise en œuvre des techniques de renseignement : outre un examen préalable des demandes des services tendant à recourir à des techniques, la commission contrôle également la mise en œuvre des techniques autorisées : c’est le contrôle a posteriori.
Dans le cadre de son contrôle a posteriori, elle peut effectuer des vérifications d’un bout à l’autre d’une surveillance, à savoir dès la phase initiale de collecte de renseignements jusqu’au stade final de leur exploitation, dont leur éventuelle transmission à des services français partenaires.
Aucune technique de renseignement ne peut être mise en œuvre sans autorisation préalable du Premier ministre, qu’il délivre après avis de la CNCTR : la commission peut ensuite vérifier l’exécution de chaque autorisation.
La commission diligente des contrôles après avoir sélectionné les affaires qui nécessitent un suivi attentif de sa part : c’est en particulier le cas pour la surveillance de personnes exerçant une profession ou un mandat protégés par la loi, ou la mise en œuvre de techniques qui impliquent l’utilisation de moyens particulièrement lourds et intrusifs. Font également l’objet d’un suivi particulier les affaires relatives à des personnes surveillées sur une longue durée, la CNCTR conditionnant une éventuelle prolongation de cette durée aux enseignements tirés de ses contrôles.
Pour les affaires les plus sensibles ou qui supposent l’emploi de procédés très attentatoires aux libertés, la commission peut assortir ses avis favorables d’observations ou de restrictions tenant aux conditions opérationnelles de mise en œuvre de la technique concernée, soit en préconisant de limiter la durée de la surveillance, soit en recommandant de la restreindre à certains lieux, qui seuls justifient d’y recourir. Elle vérifiera ensuite lors de ses contrôles que ces restrictions sont effectivement prises en compte par les agents du service.
Dans le cas, enfin, des surveillances nécessitant l’utilisation de moyens techniques sophistiqués, la CNCTR peut diligenter des contrôles immédiatement après la délivrance d’une autorisation pour en vérifier l’exécution d’un bout à l’autre, c’est-à-dire au plus près des agents des services désignés pour mettre en œuvre la technique concernée.
Le contrôle de la commission porte sur toutes les étapes de la production du renseignement :
La collecte de données
Les données recueillies au moyen d’une technique, qui se trouvent alors à l’état brut et ne présentent pas toutes une valeur de renseignement, ne peuvent être conservées au-delà d’un délai maximal fixé par la loi. La CNCTR veille à ce que les services de renseignement détruisent ces données dans le respect de ces délais, distincts selon la nature des informations conservées (ces délais sont de quatre ans pour les données de connexion et de 30 jours seulement pour des paroles ou des images).
L’exploitation de ces données
Au cours de cette étape, les données font alors l'objet d’une transformation destinée à en faciliter l’analyse : il peut s’agir d’une « extraction » (lorsqu’un service extrait une image ou un son parmi des données brutes) ou d’une transcription , (lorsqu’il rédige une note sur ce que l’agent a vu ou entendu). La commission s’assure que ces opérations ne sont effectuées qu’à des fins utiles présentant un lien direct avec les motifs de la surveillance.
La transmission éventuelle de données à un service français partenaire
La transmission des renseignements recueillis, qui consiste pour un service à partager avec un partenaire les données brutes, transcrites ou extraites qu’il a collectées, est strictement encadrée par la loi. La CNCTR vérifie que cette transmission est nécessaire à l’exercice des missions du service destinataire et que celui-ci n’exploitera les données ainsi partagées que pour des motifs relevant des intérêts fondamentaux de la Nation.
La commission réalise ses vérifications selon deux méthodes :
Le contrôle sur pièces et sur place
Pour mener sa mission de contrôle, la CNCTR dispose d’un accès permanent, complet et direct à tous les renseignements collectés, transcrits et extraits lors de la mise en œuvre des techniques de renseignement, aux documents rendant compte de ces opérations, aux dispositifs de traçabilité de ces renseignements ainsi qu’aux locaux dans lesquels ils se trouvent.
La commission se rend par conséquent dans chacun des services de renseignement, à l’échelon central comme déconcentré, sur le territoire métropolitain comme en Outre-mer, pour y effectuer ses vérifications.
Une centaine de contrôles de ce type est réalisée chaque année.
Pour certaines techniques, la CNCTR bénéficie d’un accès immédiat, depuis ses locaux sécurisés, aux renseignements collectés, transcrits ou extraits par les services de renseignement. Elle dispose alors des mêmes outils informatiques que ceux qu’utilisent les agents des services pour exploiter le renseignement et peut ainsi effectuer certaines vérifications sans avoir nécessairement à se déplacer dans leurs locaux.
Cette faculté porte sur la mise en œuvre de la majorité des techniques utilisées par les services : sont concernées, notamment, toutes les techniques nécessitant le concours des opérateurs de communications électroniques, comme les écoutes administratives.
La commission effectue des vérifications « en ligne » quotidiennement. Ces vérifications permettent également de préparer les contrôles sur pièces et sur place que la commission réalise ensuite dans les locaux des services.
En cas de découverte d’une irrégularité dans la mise en œuvre d’une technique ou lorsque cette mise en œuvre ne paraît plus justifiée au regard des prescriptions légales qui l’ont fondée, la commission peut recommander d’interrompre la technique, voire de détruire les informations déjà collectées.
Elle s’assurera que sa recommandation a été effectivement prise en compte.
À défaut, elle saisira le directeur de service concerné, son ministre de tutelle, et, s’il le faut, le Premier ministre lui-même, afin qu’il soit mis fin à l’irrégularité.
Si aucune suite n’était donnée à une telle saisine, la commission pourrait former un recours devant le Conseil d’État afin que le juge administratif statue définitivement sur la situation qu’elle a rencontrée.
Créé le 28 mars 1960, le GIC est un service à compétence nationale placé sous l’autorité du Premier ministre.
Il a pour mission de centraliser les demandes de mise en œuvre des techniques de renseignement émises par les services de renseignement, les autorisations délivrées par le Premier ministre ainsi que les renseignements collectés en application de ces autorisations.
Il dispose à cette fin du monopole des relations avec les opérateurs de communications électroniques et les fournisseurs de services sur internet dont l’autorité publique peut requérir le concours à des fins de renseignement. Il recueille les données traitées par ces opérateurs, les met à disposition des services et contrôle leur exploitation. Il contribue enfin, au profit de la CNCTR, à la traçabilité de l’exécution des techniques de renseignement.